La plus petite des M a subi un important programme d’améliorations mais est-ce suffisant pour la porter au sommet de son segment ?
L a BMW M2 n’a jamais cessé d’être un mystère pour beaucoup. Sur le papier, la combinaison de dimensions compactes, d’un 6 cylindres puissant et d’une transmission aux roues arrière un brin old school aurait dû la hisser au sommet des modèles de la gamme M. Et pourtant elle ne l’a jamais été. Elle a toujours semblé être une auto conçue à l’économie avant d’être pensée pour proposer ce que l’on attend vraiment d’une BMW M.
J’en veux pour preuve sa tenue de route un peu décousue et surtout le 6 cylindres 3,0 litres turbo qui n’était qu’une version à peine modifiée du N55 équipant l’ancienne M135i. Il n’avait rien d’un mauvais moteur mais n’avait rien de spécial non plus. À l’aise à mi-régime, il lui manquait l’appétit traditionnel des moteurs M pour les hauts régimes ainsi que leur sonorité métallique caractéristique pour prétendre équiper décemment une auto frappée de ce blason. Pour résumer, il marchait et sonnait d’une façon… ordinaire.
C’est là qu’intervient la BMW M2 Competition. Elle remplace la M2 standard et reçoit surtout de grosses améliorations qui n’ont rien de cosmétique puisqu’elle a subi une greffe cardiaque majeure en recevant désormais le glorieux S55 biturbo à bloc et pistons renforcés, vilebrequin allégé et refroidissement amélioré pris aux M3 et M4. On trouve également un nouvel échappement complet à valves pilotées. Le résultat s’affiche comme suit: 410 ch et 550 Nm de couple, soit 40 ch et 50 Nm de plus que la M2. Très prometteur car très proche des 431 ch de la M4 et même équivalent en matière de couple.
La M4 a également fait don de ses renforts de train avant en carbone et son tablier pour plus de rigidité et de précision de direction. Tout du moins sur le papier. Elle conserve néanmoins sa suspension passive dérivée de celle de la M4 mais son essieu multibras arrière gagne des rotules Unibal pour plus de rigidité là aussi. Enfin, le différentiel électronique piloté ainsi que le système de contrôle de stabilité ont eu droit à une mise à jour afin de s’adapter aux nouvelles aptitudes de l’auto, notamment en matière d’agilité.
Nous voilà dans les stands du superbe tracé d’Ascari dans le sud de l’Espagne. J’ai choisi la version à boîte manuelle (l’option DCT est facturée 3 950 euros), plus naturelle selon moi, et après un petit briefing nous partons sur la piste derrière un pace car conduit par le pilote Nicky Catsburg. Première constatation, ce dernier ne lambine pas et imprime un gros rythme à la meute. Deuxième constatation, la M2 n’est plus la même voiture. Le premier gros changement que l’on remarque concerne le moteur. Oui, ses performances y gagnent (le pack Expérience M à 2 500 euros relève la vitesse maxi jusqu’à
280 km/h) mais c’est surtout la façon dont elle s’exprime qui a changé. Le bloc pousse fort à bas régime comme son prédécesseur mais désormais il grimpe jusqu’à 7 500 tr/mn dans un hurlement mécanique frissonnant ponctué de quelques souffles de turbo. Largement suffisant pour faire enrager les propriétaires de 718 Cayman !
La rigidité supérieure joue aussi son rôle. La direction déjà assez riche devient plus précise, le train avant répond avec beaucoup plus de vivacité. La motricité est excellente en sortie de virages lents tandis que dans le rapide, l’équilibre reste savoureux et l’auto se cale aisément en légère dérive, dérive qui peut être contrôlée tranquillement à l’accélérateur. Si vous désactivez l’ESP, vous découvrirez une auto qui tourne aussi bien avec son volant qu’avec la pédale de droite. L’essieu arrière renforcé et le différentiel revu permettent une perte de grip plus progressive qui a pour effet de faire grimper la confiance du pilote. À la fin de notre session, les seuls désagréments notés proviendront de la boîte manuelle 6 rapports un peu rétive et du grognement des freins (qui stoppaient toutefois encore bien l’auto). Mais c’est sur la route que la M2 Competition prend tout son sens. Les routes autour d’Ascari se révèlent parfaites pour un test avec leur bitume alternant douce planéité et bosselé vicieux. Elles mettent tout de suite en lumière la fermeté de la M2 qui réagit aux déformations du tracé à basse et moyenne vitesses. Augmentez le rythme et cette fermeté devient votre alliée en maintenant à plat la Competition dans les courbes et en réduisant au maximum les mouvements de caisse. Il n’y a que quelques tronçons très défoncés qui rendront la voiture instable et un peu sauvage.
À des vitesses raisonnables, la M2 Competition ne sous-vire jamais et reste scotchée à la trajectoire décidée par le pilote mais elle n’a pas encore montré toute l’étendue de ses talents et notamment son caractère enjoué. Grâce à la combinaison d’un couple généreux, d’un accélérateur particulièrement aiguisé (il est possible désormais de régler individuellement et indépendamment l’accélérateur et la direction) et d’un train arrière nettement plus précis, vous pouvez à loisir vous amuser en sortie de courbe à être efficace en profitant d’une belle motricité ou bien à faire décrocher la poupe. C’est vous qui voyez. Le mode M Dynamic impressionne vraiment car il vous autorise juste ce qu’il faut de glisse avant d’intervenir. Et puis tant que l’on ne cherche pas à claquer un chrono, on s’accommode assez bien de la boîte rugueuse qui demande un minimum de patience. Cela dit, l’élasticité extraordinaire de ce moteur qui reprend dès 1 000 tr/mn permet de rester la majeure partie du temps en troisième sur ces superbes routes. Ici, dans ces collines, l’agile et plaisante M2 Competition est dans son élément.
En fait, un seul mot vient à l’esprit pour la qualifier : amusement. Mais ne vous y trompez pas, il s’agit malgré tout d’une auto sérieuse sur un segment tout aussi sérieux, mais elle est conçue pour offrir du bon temps. Elle est pensée pour vous donner accès à ses performances le plus souvent possible et surtout, pour toujours placer le pilote au centre de l’action. La M2 n’est plus un mystère, elle est maintenant celle qu’elle aurait toujours dû être et peut sereinement s’installer au sommet de la gamme M actuelle. L
BMW M2 Competition
Moteur 6 cyl. en ligne, 2 979 cm3, biturbo Puissance 410 ch de 5 250 à 7 000 tr/mn Couple 550 nm de 2 350 à 5 200 tr/mn CO2 227 g/km Transmission manuelle 6 rapports, propulsion, DGL Suspension AV bras indépendants, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs passifs, barre antiroulis Suspension AR 5 bras indépendants, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs passifs, barre antiroulis Freins disques ventilés, 380 mm AV, 370 mm AR Roues 9×19 pouces AV, 10×19 pouces AR Pneus 245/35 ZR19 AV, 265/35 ZR19 AR Poids 1 550 kg (3,78 kg/ch) 0-100 km/h 4’’4 V-Max 250 km/h (limitée) Prix de base 66 950 euros
LES “PETITES M” À TRAVERS LES ÂGES
Si l’on veut parler de petites BMW amusantes à piloter, il faut remonter à la 2002 Turbo. Il s’agissait d’une
BMW M avant l’heure avec son bloc suralimenté inédit de 170 ch qui lui a permis d’écrire sa légende alors que seulement 1 700 exemplaires furent produits. Tuée par la crise pétrolière de 1973 , il faut aussi avouer que le temps de réponse de son turbo qui se mesurait avec un calendrier ne l’aidait guère à trouver des clients. Pas plus que sa tenue de route un peu pointue d’ailleurs.
Ces erreurs ne seront pas reproduites avec la M3 E 30 de 1986 qui of f rait une agilité et une tenue de route aux standards si élevés que BMW aura bien du mal à reproduire leur magie par la suite. Chaque génération suivante de M3 sera plus rapide et plus puissante que l’originale, mais également plus lourde et moins engageante à piloter.
Le Z 3 M Coupé de 1998 ne séduisait peut- être pas au premier coup d’œil, il n’avait peut- être pas un compor tement très sophistiqué, mais il était au moins excitant. Son 6 en ligne de M3 E 36 Evolution dégonf lé à 321 ch ( les dernières versions reçurent le moteur de la M3 E 46 avec 4 ch de plus) associé à un train arrière de précédente génération le rendait extrêmement rapide en ligne droite, par ticulièrement mélodieux et très mobile dans les courbes. Si votre plaisir c’est de glisser en permanence, il vous en faut une. Mais avec seulement 6 300 exemplaires produits, la cote explose.
La M3 continuant à prendre du poids, la prochaine petite BMW réellement excitante fut la 1M. Avec seulement 2 500 exemplaires produits, elle est encore plus rare que le Z 3M Coupé. Avec sa suspension chipée à la M3 E 92 , elle promettait un compor tement dynamique plus abouti, mais avec son empattement réduit, son équilibre à la limite devenait pointu, voire très f in. Son attrait a été un peu éteint par son moteur qui, comme pour la M2 précédente, n’était qu’un bloc standard à peine retouché, en l’occurrence le 6 cylindres turbo de la 135i.