Non contente de figurer parmi les meilleures GT du marché, la 3e génération de Continental GT hausse le menton et progresse dans tous les domaines. Du beau travail qui donne une auto toujours corpulente, mais pleine de force et d’élégance…
Malgré la charge éhontée du couple et des 635 ch du W12, la Bentley se place avec une facilité que bien des voitures plus légères peuvent lui envier
2019 blue Bentley Continental GT
A son volant, tout semble facile tant la Continental GT met un point d’honneur à mêler confort, plaisir de conduite, et… à faire oublier son poids de plus de deux tonnes.
Dans la très réputée montée alpine du Grossglockner autrichien – le mont Ventoux du coin –, nous croisons un petit groupe de Jeep Renegade, certaines camoulées, en phase de mise au point de quelque version future. Un signe qui ne trompe pas. Cette route agrémentée d’épingles, de grandes enilades, planes ou très bosselées, par endroits sèches, humides voire détrempées, est un parfait juge de paix pour cerner le comportement d’une voiture.
Autre signe parlant : les responsables de Bentley ont justement choisi ce type de terrain (sur presque 500 km !) pour présenter leur nouveau bébé. Un choix hardi qui colore la coniance qu’ils ont dans leur travail ! Si la iche technique met en appétit avec le nouveau 6.0 W12 TSI de 635 ch et 92 mkg de couple dès 1 350 tr/mn (!) – double turbo double entrée, injection directe et indirecte, forêt de 48 soupapes, nouveau volant moteur, inédite boîte double embrayage 8 vitesses venue de chez Porsche (ZF), gestion électronique plus qu’optimisée… –, elle a également de quoi affoler.
En effet, avec ses 4,85 m de long pour 1,95 m de large, la lady a comme qui dirait des volumes, et écrase la balance de ses 2 244 kg, dont 55 % sur l’avant balcon. Le moteur a beau annoncer un amaigrissement de 30 kg par rapport à l’ancien W12 TMPI (qui fonctionnait, lui, au très « éconologique » E 85) et la carrosserie se gonler de ierté en revêtant une élégante toilette à 99 % en aluminium (seule une pièce en composite étant utilisée sur le haut du coffre), la belle aristocrate pourrait dévoiler quelque disgracieuse rondeur sous son déshabillé.
La ligne est plus tranchante, le comportement également. La Continental GT 2018 est une belle réussite qui allie sensations, équilibre et confort. Elle a tout compris de l’esprit GT.
Pourtant, sur cette route que n’importe quelle beauté de ce tonnage regarderait avec effroi, la Continental GT fait preuve d’une incroyable décontraction. L’ancienne génération avait déjà mis en avant le savoir-faire des hommes de Crewe en matière de mise au point, la mouture 2018 ne fait que conirmer, en y ajoutant une maturité touchante. En effet, constater au volant à quel point la grande anglaise arrive à passer outre son obésité en est émouvant.
Entre la direction parfaitement calibrée, les quatre réglages proposés – Confort, Sport, Bentley et Custom, soit personnel ; le choix Bentley apparaissant comme le plus polyvalent –, et une qualité du nouvel amortissement pneumatique hors du commun, elle efface vite votre dernier doute quant à son eficacité.
Une belle cohérence
Malgré la charge éhontée du couple et des 635 ch du W12 répartis sur la transmission intégrale active (jusqu’à 38 % sur l’avant en mode Confort et 17 % en mode Sport), la Bentley se place avec une facilité que bien des voitures plus légères peuvent lui envier. Tout comme nombre de ses consœurs ont de quoi envier cet amortissement qui apporte à la fois une belle cohérence de comportement, quel que soit le type de réglage choisi, une neutralité de tous les instants, et un confort, là encore quel que soit le réglage choisi, de haut niveau, y compris aux places arrière (comptées mais au bon maintien).
Cette lourde GT se présente comme une souple limousine si telle est votre envie, mais devient quasiment sportive si vous décidez de faire chanter soupapes et turbos. La mélodie est évidemment iltrée en mode Confort, mais s’afirme dans les deux modes suivants (Bentley et Sport), soignant alors les graves et « glougloutant » comme il faut au lever de pied. Et lorsque ce même pied décide d’enfoncer la pédale, ce sont alors vos vertèbres qui agressent le cuir pleine leur, dans un legme tout britannique, mais avec une force digne de ce nom.
Et n’oubliez pas le poids de votre « John Lobb » car, dans le cas contraire, les kilomètres/ heures montent en lèche sans que vous ne vous en aperceviez. Monstre de douceur et de méchanceté, la Continental GT surprend souvent par l’allure adoptée. La caisse est systématiquement maintenue, le roulis bien atténué, et les défauts de revêtement, pourtant souvent prononcés sur les routes du moment, gommés de très belle façon malgré de généreuses roues de 21 pouces. Seules quelques trépidations sous 100 km/h viennent parfois tapoter votre esprit.
Un tapis volant que cette Bentley des Mille et Une Nuits, capable de vous emporter à 333 km/h aux frontières du réel… tant que l’Adjudant Dugorgeon n’est pas derrière le bosquet ! Enin, attendu, lui, au coin du bois, le freinage étonne par sa capacité à encaisser le poids de vilains et répétés ralentissements montagneux, ainsi que par sa puissance et le bon « feeling » des disques acier, malgré une garde un peu longue à la pédale. Ce sont aujourd’hui les plus grands installés sur une voiture de série, avec un diamètre de 420 mm de diamètre et des étriers avant à 10 pistons.
Sur cette route que n’importe quelle beauté de ce tonnage regarderait avec efroi, la Continental fait preuved’une incroyable décontraction.
Pour contrecarrer le poids inhérent à une GT de ce format, les ingénieurs de Crewe ont fait des choix osés. Outre le fait que la structure est désormais entièrement en aluminium, les trains roulants ont fait l’objet de soins particuliers. Ici, pas de roues arrière directrices ni de différentiel actif mécanique mais, comme par le passé, des suspensions pneumatiques, plus qu’améliorées. Elles disposent désormais de trois chambres avec 60 % d’air supplémentaire, de nouvelles lois de programmation électronique et… cela fonctionne diablement bien.
De même, le « torque vectoring » distribue le couple moteur aux quatre roues selon les besoins, et fait intervenir les freins sur les roues intérieures du virage, tout en se laissant la possibilité de faire accélérer les roues extérieures, s’il estime qu’il faut aider la voiture à tourner. Un système, lui aussi, savamment mis au point en électronique, qui fonctionne en corrélation avec l’ESP et les barres antiroulis actives.
Enin, le calibrage de direction quasiparfait, que ce soit en matière de précision que de ressenti, ainsi que la transmission à double embrayage qui égrène les 8 rapports avec douceur, rapidité et à propos (mais, parfois, quelques hésitations), permettent d’obtenir un ensemble d’une rare cohérence.
La finition, évidemment
Bien entendu, qui dit Bentley, dit inition. On ne peut passer outre puisque cette GT capable de prouesses dynamiques, est également un salon roulant. Formule convenue mais réaliste. Le design est d’une droiture parfaite, tandis que boiseries et accastillage sont agrémentés d’originalités avec, à l’image des montres de marque, une très réussie décoration « côtes de Genève » (1 674 €) et des commandes « clou de Paris », au toucher parfait.
Le travail du cuir est tout aussi étonnant avec ces losanges de taille croissante surpiqués de ils qui captent la lumière, et répondent aux relets de certains accessoires.
Puissant, doux, gorgé de couple et servi par une boîte à double embrayage compréhensive, le 6.0 W12 donne des ailes à cette Bentley qui annonce fuser à 333 km/h !
Bentley a soigné la finition d’encore plus près pour sa nouvelle Continental GT et présente une option exclusive avec le sympathique écran central rotatif, ici en mode trois compteurs.
L’écran rotatif central à trois faces (tout bois, trois compteurs ou tablette 13,5 pouces, une option à 5 640 €) est une exclusivité sympathique, tandis que le silence intérieur vous place effectivement dans un salon où la stéréo a toute sa place. Nous n’avons pu tester que le système Naim haut de gamme (7 800 €), gavé de watts (2 200 !) et de haut-parleurs (18) qui… manque de réponse et de précision. Enin un défaut ! C’est certes audible, mais dans le domaine de l’audiophilie, peu importe la puissance, la qualité se situant ailleurs.
Naim n’a manifestement pas autant travaillé que les metteurs au point châssis et moteur de Bentley. Mieux vaut cela que l’inverse. Et puis, Bob Seger et Mozart s’en remettront ! En revanche, on se remet dificilement de devoir abandonner ce volant d’exception en sachant qu’on ne recroisera peut-être plus jamais sa route…
L’AVIS D’IVAN MAGOT
On s’habitue immédiatement à cette Continental GT. Facile, équilibrée, efficace, aussi puissante que parfaitement finie, magnifiquement confortable, elle domine avec élégance le monde du grand tourisme. A tel point qu’elle arrive à faire oublier son poids affolant et donne envie de l’utiliser tous les jours. Certes, le tarif est lui aussi soigné, et l’entretien probablement prohibitif, mais lorsqu’on navigue dans ces eaux…
2019 Bentley Continental GT
TECHNIQUE
Moteur : W12 biturbo bi-injection
Cylindrée : 5 950 cm3
Puissance maxi : 635 ch à 6 000 tr/mn
Couple maxi : 92 mkg dès 1 350 tr/mn
Transmission : intégrale, 8 rapports robotisés
Antipatinage/autobloquant : de série/non (Torque Vectoring via freins)
Poids annoncé : 2 244 kg
Rapport poids/puissance : 3,5 kg/ch L – l – h : 4 850 – 1 954 – 1 405 mm
Empattement : 2 851 mm
Pneus AV & AR : 265/40 ZR 21 & 305/35 ZR 21
Carburant : 90 l
Prix de base/modèle essayé : 203 160 €/255 708 €
PERFORMANCES ANNONCÉES
V.max. : 333 km/h 0 à 100 km/h : 3’’7